PREMIÈRE PARTIE : DE LA DÉCOUVERTE PAR LES EUROPÉENS AUX PORTES DE LA DÉMOCRATIE…
Il était une fois un fils parti à la recherche d’une nouvelle terre. Il avait été mandaté par sa famille car cette dernière, qui s’était habituée à vivre dans un grand confort, connaissait quelques difficultés économiques et n’arrivait plus à satisfaire ses besoins exubérants. Cet homme devait donc découvrir une terre qui avait la réputation de cacher de nombreuses richesses afin de palier aux manques de sa famille.
Le fils, brillant mais pas si convaincant que ça au niveau de l’orientation maritime, fit connaître à sa famille une nouvelle terre en 1492 (sur laquelle il n’était pas du tout le premier à fouler le sol, disons-le nous !) qu’il appela les Indes croyant avoir découvert un autre continent.
Il revint plusieurs fois voir sa famille jusqu’à ce qu’en 1498, il foule le sol du continent et d’un territoire qui se fera appeler Venezuela ou « la Petite Venise » du fait des maisons sur pilotis des habitants du lac de Maracaïbo.
Sur ce continent, il y fit venir ses frères et ses cousins qui n’hésitèrent pas à voler, à tuer et à exploiter les peuples de ce Venezuela et des immenses terres qui l’entouraient. Ceux qui ne mourraient pas, ils les forçaient à adopter les croyances de la famille, à payer pour enrichir la famille, à travailler pour eux et à les regrouper en villes afin de mieux les exploiter.
Dans ces nouveaux arrivants, certains s’occupaient de travailler la terre et de former des Haciendas (grandes propriétés) ou des Fincas (petites fermes) tandis que d’autres, les premiers à découvrir les terres, s’occuper d’acculturer les indiens. C’est ainsi que se formèrent les premières villes pour renvoyer la richesse à leur terre natale : Cumaná en 1515 ou Coro en 1527.
Face à l’immensité du territoire, la famille décida de former des provinces afin d’administrer plus facilement les affaires tant commerciales que religieuses : Margarita en 1525, Venezuela dont la capitale serait Caracas en 1636…
Durant presque trois siècles, des membres de la famille venant spécialement de la terre natale s’occupaient de la gestion de ces provinces. Leur loyauté envers leur famille d’origine était totale, leur confort complet.
Parallèlement, aux premiers arrivants de 1498 se succédaient les jeunes générations qui naquirent sur ce nouveau sol. Elles formaient rapidement la grande majorité de la société blanche du pays et les enfants peuplaient les universités tandis que les parents, propriétaires des haciendas et des magasins, faisaient tourner le commerce national. Ces derniers, appelés les créoles car nés sur cette nouvelle terre, avec le développement des idées libérales, la non-reconnaissance de la part de leur famille d’origine et l’augmentation des sommes qu’ils devaient lui donner du fait de la diminution du nombre d’indiens qui payait aussi des impôts, commençaient à vouloir sortir des jupons de leurs parents et à exister en tant que famille indépendante : ils se sentaient dorénavant américains ou vénézuéliens plutôt que espagnols. Leur réalité quotidienne s’était, qui plus est, petit à petit éloignée de celle de leur famille d’origine pour bientôt ne plus rien avoir à voir avec la vie de leurs ancêtres.
Bien entendu, le peuple originaire, les Indiens, continuaient à être exploités, privés de droits dans la réalité, soumis à l’esclavage dans les haciendas, obligés à épouser les croyances de la famille et leur nombre diminuait constamment (ce qui provoquait « l’arrivée » d’esclaves noirs sur cette terre). Ils ne feront malheureusement presque jamais l’histoire de leur terre depuis l’arrivée de ces colons.
À ce moment, l’Histoire voulait que les conflits s’ouvrent petit à petit entre les membres loyaux de la famille et ceux qui souhaitaient prendre leur indépendance et revendiquer leur nouvelle identité. Francisco de Miranda, Simón Bolívar sont deux des libérateurs républicains du Venezuela et des pays qui l’entourent : Colombie, Équateur… La rupture finale avec la royauté d’Espagne ne se fera pas si facilement. Bien que l’acte de déclaration d’indépendance arrive le 5 juillet 1811, ce n’est que 10 ans après que les conflits armés entre royalistes et indépendantiste prendra fin avec bataille de Carabobo en Juin 1821 gagnée par ces derniers.
La dure libération obtenue par cette jeune famille ne viendra pas pour autant résoudre les problèmes de politique collective, la volonté d’indépendance ne signifiant pas union nationale. Bien au contraire, les centres de pouvoir étant laissés vacants, les guerres de clans vont éclater et durer pendant plus de cent ans. Avec d’un côté les conservateurs et de l’autre les libéraux, l’avantage penchant d’un côté ou d’un autre en fonction du positionnement des Caudillos (très riches propriétaires terriens et leader politique, militaire ou idéologique). Chaque camp mènera ses propres révolutions pour accéder au pouvoir. Parmi les présidents les plus connus (tous étant soit proches soit en plein dans la dictature, pour le moins en tout cas dans des exercices du pouvoir autoritaires et autocratiques) citons Antonio GUZMAN BLANCO qui fut président de 1870 à 1887 et qui modernisa le pays, souhaitant par exemple transformer Caracas en Petit Paris par amour pour cette dernière. Il instaura l’instruction publique, gratuite et obligatoire, l’hymne national (toujours le même aujourd’hui), la laïcisation de l’État…
Juan Vicente GOMEZ, président/dictateur (le plus dur de l’histoire du Venezuela) trois fois « élu » entre 1908 et 1935, créa l’armée nationale (il n’y avait auparavant que des armées régionales, bien souvent sous commande des chefs militaires et riches propriétaires terriens (« los caudillos »), qui étaient bien entendu aussi les maîtres politiques de la région !) et fit souffrir au pays une forte répression envers les opposants politiques.
Il faut noter que durant cette période s’étalant de 1830 à 1945, pas moins de 16 constitutions auront vu le jour ! Il va sans dire que les principes changeaient en fonction des courants politiques et idéologiques des « présidents ». Ainsi, après que le vote universel a été établi en 1858 (!!!), il est supprimé par la nouvelle constitution de 1874 puis revient avec celle de 1893, puis repart avec celle de 1901…! Il en est de même pour la durée du mandat : 2 ans, puis 4 ans, puis de nouveau 2 ans, puis 6 ans…
Pour l’anecdote, le Venezuela, grâce à Juan Antonio FALCÓN, fut le premier pays à supprimer la peine de mort en 1865 !
Que peut-on donc tirer à la fin de cette période ?
Derrière de plus ou moins grands chantiers de modernisation (aussi bien sur les infrastructures que sur le fonctionnement de l’État), le Venezuela reste un énorme sac à nœud où la démocratie (droit de vote, liberté d’expressions…) est tout juste naissante (comme dans biens d’autres endroits). Ainsi, le suffrage universel n’est pas vraiment encore appliqué (en France, il vient tout juste d’arriver cela dit !), le fonctionnement de l’État dans ses différentes fonctions est balbutiant et l’idée de nation n’est que très peu existante. Les régions (pays fédéraliste) sont particulièrement disparates, chacune ayant son fonctionnement propre. C’est peut-être ici un des points les plus difficiles pour le Venezuela : il n’y a que très peu de politique national, et pas de structure étatique au niveau national (il y a encore aujourd’hui trois types d’école au Venezuela : les « bolivariennes » qui sont de l’état national, celles des états régionaux et les municipales, sans compter les écoles privées). On peut le dire : il n’y a pas réellement d’état comme on l’entend en France avec les préfets, les écoles (éducation nationale), les services sociaux, la police nationale, et tous les services récemment décentralisés… Certains auteurs d’ici affirment que la démocratie est présente mais qu’il n’y a pas d’état.
Et puis, la découverte du pétrole au début du XX° siècle va également profondément transformer la société vénézuélienne : exode rurale, abandon progressive de l’agriculture, hausse du budget de l’état national…
Cela sera entre autre au centre des politiques et de l’évolution de l’économie de la seconde moitié du XX° siècle.
À suivre…
Rédigé par Job Mesnil, au Venezuela et prof à l'alliance depuis quelques mois
lundi 14 décembre 2009
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